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Poèmes*6*
Poèmes extraits de mon recueil Feuilles de route sur la chevelure des vagues
Des mots écrits
Dans le murmure du vent des mots écrits quelque part viennent dessiner des ombres fugitives.
Un parfum d’humus enveloppe des pierres blanches près des glaïeuls sauvages
Où des phrases avalées se collent à des feuilles volantes qui se disséminent parmi la feuillée.
Les orages du monde font grossir les fleuves de la vie. Ils liment les rives décolorées
Dans l’indifférence la plus grande malgré la vaste amplitude du soleil.
Les remous menaçants aux premiers beaux jours de l’été disparaissent.
Le glissement furtif sur l’onde éveille la sensation de liberté absolue.
Il donne l’impression d’entrer dans un univers de lumière et de silence,
En étant porté par une eau vagabonde qui apprivoise lentement les nuits sombres.
L’écoulement du temps sur la verdure des sentiments peint les arcanes des cartes errantes
Vers les pentes d’une colline peuplée de prairies parsemées de fleurs miellées.
Tout se conjugue dans le long cortège des nuages qui vont vers des chemins secrets.
Au bal des mots qui se cherchent encore tout est à l’état d’écho provisoire
Dans l’attente du Verbe qui présidera à l’éloquence d’un premier rendez-vous.
Le jour embrassera la nuit dans l’étalement sans fin des crépuscules et des aubes amies.
On ne parle pas de prière tout est dans l’aptitude à raisonner l’effeuillement saisonnier
Dans le regard qui se prolonge parmi les heures instables et le chant profane
Pour entrer dans la communion fraternelle des veilleurs porteurs d’espérance.
Chapelle Saint-Martin 3 novembre 2015
L’enfant de l’ombre
L’enfant de l’ombre croise le visage de la nuit.
Il marche depuis longtemps parmi les ravines
Pendant que les esprits dansent au clair de lune.
Le vent brode les nuages dans un silence habité
Pour ensemencer la mémoire comme la douce rosée
Qui alimente le lever du jour de toutes les sèves.
La nature au large bord s’éveille dans l’éclat pourpré
Comme une nouvelle naissance et une nouvelle attention.
Tout porte à croire que le temps va dorer les heures.
Il faut penser que le langage secret des choses vues
S’ouvre sur les balcons où s’agglutinent toutes les folles espérances
Et les chants novateurs des nervures de l’âme.
Notre-Dame des Auzils 14 novembre 2015
Mes nuits perdues
Mes nuits perdues s’en vont dans les méandres des saisons.
Je suis une ombre qui passe tout au bout de la route.
La rosée mouille les premières heures et elle fait luire le silence.
Peu à peu le temps élargit les murmures.
J’entends le vent froid et l’appel du large.
Des vagues s’étalent sur le sable blond dans une étrange baie
Où le soir je cherche une étoile rose qui se poserait près d’une île couverte de feuilles d’or.
Je veux boire le lait de la nuit et l’écume de la mer
Pour oublier le pays des chimères
Qui s’étire en spirale parmi les cris aigus des goélands.
Le soleil coupe en franges dorées des nuages passifs
Qui s’éloignent vers l’immensité des plaines
Où les coquelicots incendient les blés et les liserons noirs.
L’argile primordiale semble atténuer la souffrance de la terre
Parce que l’enfer n’est pas loin des loups et des frontières.
Je cultive les fleurs qui flamboient les couchants.
Elles embellissent les rougeurs de l’aurore.
Je ne sens pas la solitude parce que mes phrases transfigurent la nature
Avec les sons proches et les rythmes solaires
Dans le miroitement du soleil et les mouvements de l’eau.
Sur des bateaux vibrants j’arrive toujours à bon port après de nombreuses escales épicées.
Je n’ai pas le temps d’émietter des souvenirs troublés parmi les récifs de corail.
A la lisière du monde je retrouve la paix d’un jardin dans une fusion salvatrice.
Palavas-Les-Flots 16 novembre 2015
Des rondes dans ma nuit
Des personnages étranges font des rondes dans ma nuit.
Des aquarelles, des gouaches, des portraits tapissent les rives de mon sommeil.
Des silences articulent des traînées de mots.
Parfois des éclats de voix brouillent des images icônes.
La nuit se drape de sentiments indéfinis et de fragments anguleux.
Je découvre des bestiaires légendaires et des contes dans l’infini des nuits.
Mon souffle se perd dans des mosaïques d’histoires et des voyages lointains.
Les nuages se gonflent de saveurs continentales. Ils dansent le long des tropiques.
Des chœurs innombrables se succèdent dans des chants idolâtres.
Quelques polyphonies deviennent plus humaines et plus libertaires.
Les voix résonnent de mots disgracieux qui gardent parfois des beautés étranges.
Je dessine un alphabet argileux et des tableaux lacustres.
Je surgis au détour d’une légende médiévale pour suivre des errances lunaires.
Je poursuis des taches solaires en décortiquant mon âme près des autels antiques.
Mes mains mélangent l’aube et le crépuscule, la rosée et la noirceur
Pour faire alliance entre les perles et les pierres noires.
Tarbes 20 novembre 2015
Dans mon jardin intérieur
Dans mon jardin intérieur, toute une assemblée de symboles disparates
Côtoient des partitions éphémères ou inachevées.
La notion de temps ou d’histoire ne précise aucun mouvement.
Les pulsions éventuelles des dates résonnent étrangement.
Quelques traces généalogiques donnent naissance :
A des rencontres inattendues et des héritages surprenants.
Je porte des dérives parentales et des mariages arrangés.
Je suis des routes sombres, pluvieuses et des prairies ensoleillées.
La vie se peuple d’un langage testamentaire et d’un souffle dénonciateur.
Une litanie de prières tente de donner naissance parmi les signes éphémères du vent.
Des fragments de mémoire sous des musiques intérieures
Chantent des verbes futuristes et des passions inattendues.
Dans mon jardin intérieur, toute une assemblée de symboles disparates
Côtoient des partitions éphémères ou inachevées.
La vie est un passage. Elle charrie toute la fusion des êtres.
Les fleurs de la nuit exhalent un envoûtant parfum.
Pau 21 novembre 2015
La solitude ne prend pas l’apparence
La solitude ne prend pas l’apparence d’un peseur de jours et de mots.
Elle ne donne pas naissance à des élégies qui changent le passé en tendresse.
J’écoute le chant des étoiles et le murmure des arbres
Pour retrouver la confiance du monde extérieur.
L’écriture héberge tous mes cris et toutes mes errances dans une encre océane.
Je pulse les confidences du matin qui montent de la terre.
Alors les vibrations des regards apparaissent entre les herbes drues.
Il y a les contes qui fourmillent dans l’infini des nuits.
Je pars en suivant les empreintes de la terre et le baiser du vent
Parmi les méandres d’une mémoire escarpée dans la fluidité de l’air rougeoyant.
Mais le brouillard est là étrange compagnon qui change un peu l’ordre des choses attendues.
Les rêves tracent les nervures encore des premiers pas de l’enfance.
Les ombres dansantes tirent les volets des maisons closes
Où les figures de la mort s’obstinent à quitter les lieux.
Le jardin abandonné garde les souvenirs des rosiers grimpants et du lierre antique
Malgré les amours délaissées sur un mur de pierres nues.
Je cherche un poème éphémère qui s’envolera à la tombée de la nuit
Et qui disparaîtra dans un tourbillon pour retrouver au matin les brumes blanches.
Le soleil viendra ensuite effleurer les mots pour les diluer dans une espérance printanière.
Je chanterai les clairières du ciel, les chuchotements crépusculaires et les touchantes amours.
Pau 21 novembre 2015
Je viens d’entrer dans les plis
Je viens d’entrer dans les plis si épais de ma mémoire
Que je ne trouve plus le lieu originel de ma naissance.
C’est tout un jardin étrange qui aligne les adolescentes fleurs,
Les troublantes amours et les tracas des rêves cruels qui ne consolent plus.
Je n’éprouve aucune méfiance curieuse quand mon corps est secoué
Par les vibrations inlassables qui produisent les futures floraisons
Entre l’ombre et la lumière dans les moindres recoins de mon âme.
Sur les branches émoussées restent des nids abandonnés.
Ma vie se déplie parmi les sauvages pensées et le moment attendu
Où les souvenirs engoncés sortent d’une bouche muette
Pour étouffer des peurs bleues et des lueurs en perte d’équilibre.
Je regarde s’enfuir des pages de l’oubli loin des serres du passé.
Maintenant je visite l’existence avec l’humilité de la parole
Pour mesurer la profondeur de la terre et les timides lumières
Qui accompagnent des présences et un sourire hésitant.
Je tisse la dentelure des notes à la naissance des bourgeons.
Pau 22 novembre 2015
Le bleu profond
Il y a toujours un bleu profond qui reste en moi
Depuis que mon amour est parti pour une autre rencontre.
Ma maison est bien silencieuse et les mots sont absents.
Je garde les quelques lettres dans un coffret tout de noir laqué.
J’étale quelques pétales de rose sur mon piano noir.
C’est dans la nuit que je joue quelques partitions
Pour être plus proche des caresses infinies du monde.
Le passage des heures laisse entendre quelques confidences.
Je ne fais pas appel à ma mémoire le présent est déjà un équilibre
Parce que les étoiles donnent la même lumière.
Dans mon jardin tout fleuri j’ai toujours envie de toucher le cœur des fleurs
D’écouter le bruit des feuilles et le chant des mésanges.
La tristesse n’envahit pas mon histoire.
Elle l’effleure pudiquement malgré quelques ciselures imparfaites.
Ma voix ne heurte pas les mots parce que je tiens à saluer le jour qui lève
Comme un regard qui s’offre dans des miroirs infinis.
Je devine les ombres fuyantes qui dessinent autour de moi
Des chemins qui rendent les pas si lourds et la bouche ouverte.
Le jour qui se lève garde toujours le frémissement de la nuit.
Je vois passer celle qui visite encore mes rêves.
Je me dis que l’écho de quelques mots d’oubli
Ne colore pas la lumière double et ni le tendre pouvoir des mains.
C’est un sourire qui grandit dans la glissade lente du temps
Parmi le pourpré des roses et le jaune tendre des jonquilles.
Villefranche de Lauragais 22 novembre 2015
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